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Dans les méandres du döner kebab : Les saveurs cachées du passé

döner kebab matxup
"Dans l'ombre mystérieuse du passé, les secrets se révèlent. "
Carlos Z. Sourcer, Matxup
Carlos Z.
Sourcer

L'origine du kebab

Le döner kebab, ce délice culinaire d’origine ottomane, porte en lui une histoire aussi fascinante que la saveur qui se dégage de ses fines tranches de viande grillée. En plongeant dans les méandres de son passé, nous découvrons une photographie capturée en 1855 par James Robertson, graveur en chef à la Monnaie impériale ottomane, qui nous offre un aperçu unique d’un cuisinier ambulant attendant patiemment ses clients, sa viande tournant lentement sur un comptoir mobile. Le mot döner, qui signifie « tournant » ou « qui tourne » en turc, trouve ainsi tout son sens.

Le döner kebab, également connu sous les noms de gyros en grec ou de shawarma en arabe (un terme dérivé du turc çevirme), se compose en Europe de morceaux de viande soigneusement empilés sur une broche en forme de cône inversé, tournant lentement sur elle-même, grillée avec soin au feu de bois ou plus couramment dans un four tournant au gaz ou électrique. Pendant la cuisson, la couche externe de la viande de mouton, d’agneau ou de veau est découpée en fines tranches, permettant ainsi à la cuisson de se poursuivre.

Le döner, véritable incarnation du kebab, terme désignant une méthode privilégiée pour la cuisson de différentes viandes directement sur le feu, sans ajout d’eau, se dévoile dans toute sa splendeur. Selon les anciens livres de cuisine ottomane, il existait deux méthodes distinctes de préparation du kebab aux XVIIe et XIXe siècles. D’une part, les morceaux de viande, qu’il s’agisse de mouton, de volaille ou même de gibier à plumes, étaient grillés sur des brochettes au charbon de bois. D’autre part, le kebab pouvait également être cuit au four ou dans une casserole. La technique du döner, quant à elle, n’apparaît dans les livres de cuisine qu’à partir des années 1880. Toutefois, l’histoire du döner demeure en grande partie entourée de mystère.

La première référence à ce plat se trouve dans le Seyahatname d’Evliya Çelebi, célèbre voyageur ottoman. Il relate avoir dégusté en 1666, en Crimée, une variété de kebab rôti horizontalement préparée par les Tatars. Selon lui, « ils abattent un mouton gras en entier, ensuite coupent toute la viande en tranches et les embrochent sur une brochette de sorte qu’elles y soient épaisses dans le centre et minces aux deux extrémités pour qu’elles ne débordent pas. Ensuite, une roue de chariot est cassée et placée sous le kebab qui cuit alors que ce morceau de bois se consume lentement ». Cette forme de kebab traditionnel a perduré jusqu’à nos jours dans la région du nord-est de l’Anatolie, notamment à Artvin, Kerkük, Yusufeli et Erzurum, où il représente le met de choix lors de tout pique-nique en plein air.

 

Deux villes se disputent l'invention

De nos jours, deux villes turques se disputent l’honneur d’avoir inventé le döner kebab sur broche verticale : Kastamonu, où la célèbre cuisson est attestée en 1855 grâce au talent du cuisinier Hamdi Usta, et Bursa, dans les années 1880, où officiait Iskender Efendi. Toutefois, la photographie de Robertson ainsi qu’une gravure en couleurs représentant un rôtisseur de döner kebab démontrent qu’Istanbul peut également prétendre à ce titre prestigieux. Les récits de voyageurs européens font également état de la présence du döner kebab dans diverses villes depuis au moins la seconde moitié du XIXe siècle. Eugène-Jacques Chesnel, connu sous le nom de Kesnin Bey, mentionne qu’à Istanbul dans les années 1880, la viande de mouton était grillée sur de petites brochettes (sis kebab) ou rôtie sur une broche verticale, et portait le nom de deunel kebab. Un livre de cuisine intitulé « La Maîtresse », publié en 1883 à Istanbul, décrit ce même plat sous le nom de « kebab d’Izmir ». Un autre voyageur anglais atteste de la cuisson du kebab sur broche tournante verticale à Amasya, une ville du nord-ouest de l’Anatolie, dans les années 1915.

 

Son arrivée en Europe occidentale

Autrefois préparé de manière artisanale en petites quantités de 20 ou 30 kilos, rôti lentement au feu de charbon de bois, le döner est devenu un plat quasi-industriel emblématique de la restauration rapide, adapté aux goûts locaux. La viande est marinée avec du sel, des épices, des oignons, du lait ou du yaourt, puis disposée sur la broche. Initialement composé de mouton, on le retrouve désormais associé au bœuf, tandis que des variantes modernes incluent du poulet, de la dinde ou du porc. La production de longs blocs ovales de viande pesant de 20 à 200 kilos est aujourd’hui réalisée par des fabricants industriels qui en produisent plusieurs milliers de tonnes par jour en Europe, principalement en Allemagne.

Ces fabricants approvisionnent des petits restaurants de döner tenus par des Turcs, des Kurdes, des Arméniens, des Grecs, des Chypriotes, des Libanais ou des Iraniens à travers le monde. Grâce à son prix abordable, le kebab convient à toutes les bourses et peut être consommé rapidement en se tenant debout dans la rue. Il est également susceptible d’être décliné de multiples façons pour satisfaire les différentes papilles. Le kebab est devenu un best-seller du goût planétaire.

L’arrivée du döner en Europe est un autre sujet empreint de légendes. On raconte qu’un jeune émigré turc du nom de Mehmet Aygün l’a introduit à Berlin en 1971, où il servait de la viande grillée dans une pita agrémentée de sauce. Toutefois, l’histoire se révèle probablement plus complexe et s’inscrit dans les grandes vagues migratoires. La première diffusion du döner en dehors de l’Empire ottoman a commencé dans les années 1920 avec l’arrivée en France des Grecs d’Anatolie. Ils y ont ouvert des restaurants dès les années 1930, proposant des döner kebab qui ont pris le nom grec de « gros ». Suite à un accord bilatéral sur la main-d’œuvre entre la Turquie et l’Allemagne en 1961, suivi de la France, de la Belgique et des Pays-Bas, des centaines de travailleurs turcs ont afflué en Europe. Les immigrés turcs ont alors lancé la restauration rapide de kebab, et les petits restaurants (appelés Dönerbuden) se sont multipliés, notamment en Allemagne, en particulier à Kreuzberg, quartier turc de Berlin, où ils ont commencé à vendre des döner. Entre les années 1980 et 1990, le nombre d’établissements de kebab tenus par des immigrés turcs a connu une croissance remarquable en Allemagne, mais aussi en France, en Belgique, aux Pays-Bas et en Angleterre.

Initialement consommé principalement par les Turcs, le döner kebab est rapidement devenu un plat très populaire dans le domaine de la restauration rapide. Servi sous forme de sandwich, garni de fines tranches de viande grillée (d’agneau, de veau ou de poulet), agrémenté de salade, de tomates, d’oignons et de différentes sauces (yaourt, harissa ou même houmous) et accompagné de frites, il est désormais apprécié par de nombreux palais.

Originaire de la cuisine ottomane, il est devenu un symbole de l’identité turque en Allemagne et en Europe, transcendant les frontières culturelles. La dernière étape de la diffusion du kebab à travers le monde a été orchestrée par les Libanais, qui l’ont introduit sous le nom de « shawarma » en Amérique du Sud et en Afrique. Au Mexique, le döner « al pastor » (littéralement « du berger ») est ainsi proposé sous forme de tacos (à base de maïs) garnis de viande de porc grillée, ou parfois en sandwich préparé avec du pain plat appelé « pan arabe ». La viande de porc, marinée dans un mélange d’épices, de piment, de jus d’ananas et parfois d’achiote, reflète ainsi les saveurs locales mexicaines.

 

"tournant lentement sur elle-même, grillée avec soin au feu de bois"

FAQ

D'où viennent ces pains de viande ?

Principalement d’Allemagne. Il existe également au Mexique une variété de tacos inspirée des kebab, les tacos a Pastor.

Faut-il toujours tirer les prix au plus bas ?

S’il y a bien un domaine où tirer les prix vers le bas est à déconseiller, c’est la boucherie. Les bas prix sont « toujours » synonymes de mauvaise qualité. 

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